mardi 15 février 2011

Démolition de la rue Paul Claudel

Un gâchis payé par les locataires...


On s'apprête à démolir toute la rue Paul Claudel : 129 logements, tous réhabilités dans les années 1990 avec ajout de vérandas,de balcons et d'accès pour handicapés.
Dans les années 2000 toutes les les huisseries ont été changées.
Ces beaux immeubles, tout près du centre commercial et des écoles, avec des abords bien aménagés vont être broyés, rasés. Pourquoi ? Comment peut-on justifier un tel gâchis ?
Fin 2007, les derniers habitants de la rue Paul Claudel avaient dû faire une manifestation pour obtenir une réunion de concertation avec le directeur d'Orne Habitat et les élus de la ville. Ils avaient dénoncé l'absence d'entretien (rats dans les caves inoccupées, cafards...) et ils avaient dit leur volonté de garder leurs appartements.
En réponse, le directeur d'Orne Habitat a fait faire une opération de dératisation et de destruction de cafards mais il leur a confirmé que leurs logements seraient bien détruits. Dans les jours qui ont suivi, il a envoyé des conseillères sociales pour inciter les derniers locataires à déménager plus vite.
Les locataires n'ont pas compris pourquoi Orne Habitat voulait détruire leurs immeubles pour en reconstruire d'autres. Certes, leurs appartements pouvaient être améliorés, mais de là à les démolir !
Pour les aider à partir, les agents des HLM leur ont dit qu'ils seraient prioritaires pour occuper les nouveaux logements, mais quand ? à quel prix ? Les réponses sont restées vagues.
Ce qu'on ne leur pas dit, c'est combien tout cela allait coûter et qui payerait.

Combien ça coûte ?
Pour démolir ces 129 logements Orne Habitat va dépenser 1 350 000 euros
Pour reconstruire 60 logements à cet emplacement il va dépenser 5 360 000 euros
Coût total de l'opération Orne Habitat : 6 710 000 euros
Chaque nouveau logement construit coûtera donc en moyenne : 112 000 €.
A titre de comparaison, la réhabilitation d'un appartement de l'immeuble de la rue Alfred de Musset (même type de construction que les anciens de la rue Paul Claudel) coûtera 14 240 € .
Mais cela, on ne l'a pas dit aux locataires qui voulaient rester dans leurs appartements !
On ne peut savoir tout cela qu'en lisant la « maquette financière » annexée à la Convention ANRU votée par la ville en novembre 2007 et par la communauté urbaine en janvier 2008. Les chiffres ci-dessus sont tous tirés de ce document.
Mais qui l'a lu ? Qui l'a analysé ? Qui l'a compris ?
Pour cela il aurait fallu que cette maquette financière soit diffusée et expliquée... mais elle est restée dans les dossiers des élus ou dans les bureaux de l'ANRU et des directions des HLM.
Si tout le monde l'avait bien lue et bien comprise, aucun nouvel élu du PS n'aurait pas pu dire en 2008 : « Cette Convention est une occasion à ne pas manquer. On ne peut passer à côté de 84 millions d'investissements ! La réalité c'est que la moitié de ces investissements sont payés par les organismes de logements sociaux. Mais revenons à la rue Paul Claudel...

Qui paye ?
Nous avons vu qu'à la place des immeubles détruits, Orne Habitat veut construire 5 immeubles de deux étages, soit 60 logements au total. Cela coûtera 5 millions 360 000 euros
La ville paiera 150 000 euros
Le conseil général 300 000 euros
L'ANRU 650 000 euros
Il restera donc à payer 4 millions 300 000 euros
Si on récapitule : la ville paye 3 %
le conseil général 6 %
l'ANRU 12 %
et les locataires 79 % !!!
Ce ne sont pas les subventions de l'Etat !
Pour cela Orne Habitat devra emprunter 3 Millions 900 000 euros qu'il faudra rembourser avec les intérêts. Comment ?
Avec l'argent des locataires, puisque plus de 90 % de ses ressources proviennent des loyers ! Ce sont donc tous les locataires d'Orne Habitat qui paieront 400 à 500 euros en moyenne pour la seule opération de la rue Paul Claudel.
Il n'y aurait rien à redire si c'était pour mieux loger les locataires aux revenus modestes pour lesquels les HLM ont été inventés mais ce n'est pas le cas !
Une opération dont les locataires les plus modestes ne profitent pas...
Au nom de la mixité sociale, les nouveaux logements seront d'un standing supérieur aux appartements démolis, donc inaccessibles aux plus pauvres, sauf pour quelques cas particuliers..
... mais dont ils payent le déficit !
De plus, avec un prix de revient de 112 000€, ces nouveaux programmes ne sont pas autofinancés. Si c'était le cas les loyers seraient tels qu'ils ne pourraient même pas être loués à des classes moyennes. Ils ne pourront l'être que parce que les HLM vont aller puiser des ressources dans les bénéfices de leurs programmes anciens, déjà amortis. En clair, les loyers des locataires des immeubles anciens, occupés le plus souvent par les locataires les plus modestes, financent en partie les nouvelles constructions. Les plus pauvres payent pour les plus riches, mais on ne leur demande pas leur avis !
Ainsi donc, à Alençon est continuée une politique de rénovation urbaine lancée par l'ancienne majorité municipale. Il est regrettable que l'actuelle municipalité PS se soit inclinée face au pouvoir technocratique de l'ANRU.
Il est tout aussi regrettable que les «milieux militants » soient restés trop souvent éloignés de ces sujets. Ainsi, les mêmes discours officiels peuvent continuer de se répandre, affirmant que les démolitions-reconstructions sont la seule solution.
Pourtant, il était possible de faire autrement en renégociant la Convention de Rénovation urbaine avec l'ANRU et les HLM. Pour un coût infiniment moins important on pouvait garder les locataires sur place et réhabiliter leurs logements. A Alençon la rue Lamartine, malheureusement abandonnée par ses gestionnaires et détruite par l'ANRU en était un exemple.
La rue Jules Védrines, à Courteilles, en est un autre, toujours habitée depuis plus de 20 ans. Vous pouvez en trouver d'autres en consultant ce blog.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Vraiment très intéressant...
Vous avez raison, laissons les gens dans des clapiers à lapins. Donnons un coup de peinture sur les murs, changeons les robinets et augmentons les loyers de 10 ou 15% (Car tous travaux sont récupérables à travers les loyers).
Vous avez raison, ne dépensons pas d'argent au bien être des gens. Vous avez raison, Perseigne sera habité par les gens les plus riches de la place d'ALENCON grâce aux nouvelles constructions.
Vous avez raison, un organisme public de l'habitat est réputé pour assommer ses locataires les plus pauvres de loyers affreusement chers pour financer le logement des nantis de la ville.
Vous avez raison, vous n'avez rien compris...

Vous êtes vous posé la question du coût de la réhabilitation complète de ce bâtiment? Non, vous avancez des chiffres piochés ici et là sans vous soucier de la spécificité de chaque bâtiments.
Vous êtes vous posé la question de la vacance de ce bâtiment (donc de la perte financière pour le bailleur) dû à des types de logements qui ne sont plus adaptés aux demandes de locataires? Non.
Vous êtes vous posé la question des avantages des nouveaux bâtiments? Non juste du loyer plus cher. Pourtant se seront des bâtiments classés THQE, ce qui veut dire que à loyer plus cher, le locataire en définitif, en incluant les charges ne paiera pas plus cher qu'avant.

C'est bien, vous semblez vouloir vous investir dans notre belle ville... mais faites le intelligemment. Ne dites pas à tout va que le seule but des organismes HLM est de faire de l'argent sur le dos des plus pauvres.
Grace à des gens comme vous, les ghettos ne sont pas prés de disparaitre.

Perseigne mérite un embellissement, que l'on lui redonne taille humaine. Marre de ces quartiers clapiers enclavés.
Peut importe le prix que cela coute, supprimons les ghettos.
Une question : Vous qui militez pour que les gens vivent dans des barres HLM sans âme et juste rénovées dans un quartier à mauvaise réputation, ou habitez-vous ?

Un Alençonnais qui aime sa ville